David Pestieau
1. Consacrer moins d'argent aux soins de santé
Rudy Thomaes, dirigeant de la fédération patronale FEB, ne veut plus que le budget des soins de santé puisse augmenter de 4,5% par an, comme prévu dans la loi . Pour la FEB, les 23 milliards d'euros de la sécurité sociale consacrés aux soins de santé doivent diminuer.
Ces 4,5% de croissance sont une norme arrachée par les syndicats en 2003, qui prend en compte une augmentation normale et nécessaire des dépenses en matière de santé : la population vieillit, la médecine progresse. Donc les besoins augmentent. De plus, les factures d'hôpitaux font exploser le budget des malades. Toucher à ces dépenses pourrait donc faire mal.
2. Moins de fonctionnaires et de service public, du fédéral au communal
La FEB veut réduire fortement le nombre de fonctionnaires et économiser ainsi 5 milliards d'euros. Sont visés : les fonctionnaires fédéraux (pense-t-on au domaine des finances où il manque de personnel pour lutter contre la fraude fiscale ?), et aussi voire surtout - les agents communaux (pense-t-on aux balayeurs de rue ou aux employés des CPAS ?). Les pensions des fonctionnaires seraient aussi en ligne de mire.
3. Un « index vert » pour bloquer les salaires
Taxer les plus riches ? Pas question pour la FEB. Mais « aucun interlocuteur en Europe ou en Belgique ne peut refuser le débat sur la fiscalité verte. », estime Rudy Thomaes. Va pour taxer plus l'énergie ou des produits comme les bouteilles plastiques. A charge du consommateur.
Mais le chef de la FEB précise qu'« il ne faut pas que, via l'index, cela entraîne une hausse des salaires. ». Sa solution : « un filtre pour que les produits plus chers ne fassent pas augmenter l'index, ce qui rendrait les salaires plus élevés. » En somme, la FEB veut introduire un « index vert ». Depuis 1993, la liaison des salaires au coût de la vie, via l'index, n'est plus totale : essence, diesel et cigarettes ont été retirés. On appelle ça pudiquement « l'index santé ».
La FEB veut retirer de l'index toute une série d'autres produits qualifiés de polluants. L'index santé deviendrait l'index vert. Au nom de l'écologie, le patronat veut bloquer les salaires.
Caroline Ven, chef de cabinet d'Herman Van Rompuy, chargée des questions socio-économiques, va moins loin mais insiste : « il est essentiel de maintenir la modération salariale. »
4. Augmenter les taxes sur l'énergie
Le secrétaire d'Etat Bernard Clerfayt (MR) propose d'augmenter les taxes sur l'énergie pour faire baisser les charges sur le travail.
Ce qui est sûr : selon son plan, vous devrez payer plus. Il vise à augmenter progressivement les accises sur le diesel, le mazout et le gaz naturel de chauffage. Recettes attendues : 1,6 milliard d'euros. Votre facture était déjà élevée. Et bien avec le MR, ce sera encore plus cher, quelque soit votre revenu. Mais votre patron, lui, bénéficiera de la baisse des charges sur le travail.
ou chez eux (selon les syndicats ou le PTB)
1. Pas touche aux pensions et aux soins de santé
Les syndicats ont manifesté le 15 mai sous le thème « Les travailleurs ne doivent pas payer la crise ».
A l'heure du budget, Anne Demelenne, secrétaire générale de la FGTB précise : « Pas question de raboter sur les dépenses sociales, parce que les travailleurs sont victimes de cette crise. Raboter les pensions ? En Belgique, la moitié des pensionnés ont moins de 1000 euros par mois. On va toucher aux soins de santé ? Pas question. Le système a démontré qu'il est peu coûteux par rapport à la couverture. On va toucher au chômage ? Alors qu'on constate que le chômage augmente et que ce sont les travailleurs qui paient la crise. Il faut pointer les responsabilités. Le monde financier est responsable. »
2. Ceux qui ont une plus large carrure doivent supporter les charges les plus lourdes
Luc Cortebeeck, président de la CSC, avance qu'il faut rétablir une fiscalité qui touche davantage les plus nantis pour combler le trou : « Il est d'une grande importance que la progressivité des impôts soit rétablie. Ce principe a été peu à peu détricoté ces dernières années. Il est tout de même normal que ceux qui ont une plus large carrure supportent les charges les plus lourdes. »
Anne Demelenne explique : « Le gros problème, c'est qu'il y a beaucoup d'impôts sur le travail et peu sur le capital. 70% des recettes fiscales proviennent soit du travail, soit de la consommation. L'impôt des sociétés, c'est 13% et l'impôt sur le capital, 3%. Nous refusons toute augmentation d'impôt sur les bas et les moyens revenus. Par contre, pour les hauts revenus, c'est différent. En Belgique, on arrive très vite au plafond, au taux d'imposition maximum. L'impôt, progressif, est de 50 % sur les revenus supérieurs à 33 000 euros. Que vous en gagnez 40 ou 400 000, c'est la même chose. Avant 2004, l'impôt était encore de 55 % pour tous les revenus supérieurs à 60 000 euros. Il y avait une réelle progressivité. Aujourd'hui, l'impôt progresse trop vite, mais il plafonne trop vite aussi. Il faudrait revenir à la situation antérieure aux mesures de Reynders. »
3. Combattre la fraude fiscale pourrait rapporter gros
Pour Anne Demelenne, il faut « mieux lutter contre la fraude fiscale, qui s'élève à près de 30 milliards. En France, la fraude fiscale est estimée à 2 % du PIB. En Belgique, on est quasiment à 10 % du PIB. » 10% des plus riches familles de Belgique sont responsables de 57% des montants de cette fraude fiscale. Alors que les 10% des moins riches le sont pour 0,1%.
30 milliards à récupérer ? C'est l'équivalent de 7.000 euros par an à chaque famille belge. Par où commencer ? « Ce que nous voulons c'est la levée du secret bancaire », avance Demelenne.
4. La taxe sur les millionnaires : simple et a montré son efficacité à l'étranger
« Nous sommes pour des impôts plus hauts sur le capital et les fortunes. » , avance Luc Cortebeeck.
Dans ce sens, le PTB avance comme mesure centrale l'introduction d'une taxe sur les millionnaires : un impôt de minimum 2% sur les fortunes au-dessus d'un million d'euros, déduction faite de la maison d'habitation. Un impôt sur la fortune du même type existe en France .
Cette taxe qui toucherait seulement les 5% des ménages les plus riches pourrait rapporter 10 milliards d'euros. Elle permettrait d'éviter les économies sur le dos des travailleurs, de créer des emplois dans les soins de santé, l'enseignement et les services publics, et de garantir le paiement de pensions et allocations de chômage décentes.