Auteur: T 34
Sujet: Les sans papiers en France
Envoyé : 05 May 2009 à 20:39
Mayotte : plus de 700 mineurs ont été expulsés depuis le début de l'année, souvent en toute illégalité
Selon les données de la préfecture rendues publiques le 16 avril, entre le 1er janvier et le 31 mars 2009, 3.778 arrêtés de reconduite à la frontière (APRF) ont été exécutés par la Police aux frontières, mais ce sont bien 4.487 personnes qui ont été refoulées du territoire. Un adulte faisant obligatoirement l'objet d'un APRF, la différence est donc à trouver chez les enfants, qui eux ne peuvent faire l'objet d'un APRF.
Rien de très nouveau en soi : les autorités sont dans les clous des années précédentes, puisqu'en 2008, près de 3.000 mineurs ont été expulsés – autant en 2006 et en 2007. Rien de très nouveau, non plus, dans les pratiques : sur le lot, certains sont des mineurs qui accompagnent leur(s) parent(s) ; mais d'autres sont des mineurs isolés qui jamais n'auraient dû se retrouver au Centre de rétention administrative (CRA) – encore moins à Anjouan.
Régulièrement, les bénévoles de la Cimade, l'association habilitée à informer les étrangers de leurs droits au CRA, enregistrent des exemples d'enfants placés sous la tutelle d'un adulte qu'ils n'ont jamais vu. Parfois, ils arrivent à le faire sortir, parfois non. Le procédé est totalement illégal : quand un gamin arrive au CRA, on l'accole à un adulte, à qui les policiers font signer un document intitulé : « Attestation de rattachement ». Qui précise : « Je soussigné… atteste sur l'honneur que le ou les mineurs dénommé(s) ci après… » L'une des cinq cases est alors à cocher : « Est mon fils ou ma fille ; Est mon neveu ou ma nièce ; Autre lien de parenté ; Dont je suis le tuteur ; Dont je suis le responsable, confié à mes soins le… par ses parents… » Le tout en langue française, sans traduction, mais avec le tampon de la PAF. « Ils ne le remplissent même pas ce document », s'insurge un policier de la PAF. « C'est nous qui le remplissons, et ensuite on le leur fait signer, sans leur traduire. On leur explique juste qu'ils devront remettre ça aux autorités à leur arrivée à Anjouan. » Le choix de l'adulte « se fait au hasard » ajoute-t-il.
« On se fout de son âge »
Dans un rapport remis à Super Sarko, Dominique Versini, qui s'était rendue à Mayotte en octobre, dénonce une autre pratique « consistant à inscrire les mineurs comme étant nés le 1er janvier de l'année permettant de fixer leur majorité (en 2008, tous les mineurs sont inscrits avec la date de naissance du 01/01/90) » Cette pratique est aujourd'hui toujours en vigueur, comme le révèlent la Cimade et notre policier. « Cela arrive très régulièrement. Quand on voit un jeune arriver, et qu'il a l'air assez grand, on se fout de savoir quel âge il a. On lui change sa date pour pouvoir le renvoyer », dit ce dernier. Le 11 mars, la préfecture a été condamnée par le Tribunal de première instance de Mamoudzou pour cette pratique, qualifiée de « voie de fait ». Elle a été reconnue coupable d'avoir expulsé un mineur isolé et d'avoir falsifié son âge. Une première devant une juridiction civile – les condamnations par le Tribunal administratif sont plus nombreuses. « Jusqu'à quand ? », s'était interrogé l'avocate du gamin, Fatima Ousseni, lors du procès.
RC