samedi 30 octobre 2010

g16 : 20ans de contre-révolution en Allemagne

 

From: nicolas
Sent: Friday, October 22, 2010 11:45 PM
To: Romain
Subject: [romain : paix_socialisme_communisme] Fwd: 20ans de contre-révolution en Allemagne


De l'annexion de la RDA à une Union Européenne comme directoire des monopoles ouest-allemands... vingt ans de contre-révolution en Allemagne

vendredi 15 octobre 2010, par Comité Valmy


Kohl, Bush, Gorbatchev à Berlin - Octobre 2009

Allemagne : Vingt ans de contre-révolution

Article de Rui Paz, département international du Parti communiste portugais, dans O militante (septembre/octobre 2010)

Traduction MAhttp://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

Cela fait 20 ans, le 3 octobre, que l'Allemagne Fédérale entamait officiellement le processus d'annexion et de colonisation de la République démocratique allemande. La grande bourgeoisie et les serviteurs du capital monopoliste ont l'habitude de présenter les événements qui ont conduit à la fin du socialisme en RDA comme un acte « révolutionnaire » ou « libérateur », mais le temps s'est chargé de démontrer qu'il s'agissait et qu'il s'agit toujours d'un long processus contre-révolutionnaire, aux proportions dévastatrices. Ceux qui à partir de 1990, dans une orgie de vandalisme politico-culturel, ont détruit les bibliothèques et les livres, les galeries et les tableaux, fermé les cliniques et les académies, licencié les enseignants, écarté les journalistes et changé le nom des rues portant le patronyme de communistes, de socialistes et d'anti-fascistes comme Clara Zetkin, ce sont les mêmes qui dans les vingt dernières années sont revenus sur les droits des travailleurs, ont démantelé l' « État social », intensifié le militarisme et les guerres d'agression et qui, dans un processus honteux de révision et de falsification de l'historien, cherchent à blanchir le grand capital de ses crimes et à criminaliser les forces de résistance.

L'existence du premier État socialiste allemand a toujours été une épine dans le cœur de l'impérialisme. Après la seconde guerre mondiale, la lutte du mouvement ouvrier et l'existence du socialisme en RDA ont contraint les groupes monopolistes, qui s'étaient enrichis à l'ombre de la terreur nazie, à faire des concessions à la classe ouvrière. Mais l'objectif de liquidation du socialisme qui avait mené Hitler à envahir l'Union soviétique restait toujours inscrit à son agenda contre-révolutionnaire.

Malgré de graves déficiences, des déformations de la démocratie socialiste et des contraintes importantes de l'ordre international, les acquis réels du socialisme en RDA, comme l'élimination de la misère, le plein emploi, l'éducation de haut niveau, l'accès généralisé à la culture et au sport, la santé universelle et gratuite, le logement à loyer très bas, des retraites assurées une fois arrivé dans la vieillesse, etc., sont en contradiction flagrante avec la réalité qui est vécu aujourd'hui dans les pays capitalistes. On comprend mieux pourquoi de plus en plus la machine de propagande du grand capital cherche à minimiser les acquis du socialisme, ou à les discréditer, comme si ils étaient des vieilleries du 19ème siècle, diffusant l'idée qu'il n'y a pas d'alternative à un système, le capitalisme, qui génère autant de chômage et de misère.

Une fois que la RDA a perdu sa souveraineté, une vague de 30 000 fonctionnaires et d'administrateurs publics envoyés par Bonn ont envahi le territoire de l'Allemagne de l'Est avec comme objectif de garantir la liquidation des structures du socialisme et la transformation de l'appareil d'Etat en un instrument au service du capital monopoliste. Presque toutes les positions-clés ont été occupées par les allemands occidentaux. Plus était importante la fonction, plus élevé était le pourcentage de fonctionnaires occidentaux. En 1990, les 62 secrétaires d'Etat des différents gouvernements régionaux de l'Est venaient tous de RFA. A travers la « Treuhand » - un organisme créé expressément pour privatiser et démanteler l'économie de la RDA – la Deutsche Bank, et les monopoles occidentaux se sont empressés de brader tout ce qu'il pouvait, dans certains cas arrêtant la production et se débarrassant ainsi de concurrents peu commodes. Les citoyens de l'ancienne RDA se sont retrouvés en un instant à vivre dans un pays vendu. 85% des entreprises ont été accaparées par le capital allemand occidental, tandis que 9% d'entre elles ont été réparties entre le capital d'autres Etats européens, comme la France, la Suisse, l'Autriche, l'Angleterre et la Hollande. Seules 6% sont restés sous le contrôle d'Allemands de l'Est. La production industrielle a chuté d'un tiers. L'hebdomadaire Die Woche a qualifié ce processus du « plus grand démantèlement d'une nation industrialisée en temps de paix ». (1)

Seulement entre Octobre 1990 et décembre 1994 ont été liquidées, comme si elles avaient été dévastées par une invasion de sauterelles, 75% de l'économie, des usines et unités de production industrielle et agricole qui étaient propriété de tout le peuple de RDA. 40 000 contrats de privatisation d'entreprises ou de ses branches les plus rentables ont été signés par la « Treuhand ». Dans cette même période, le pourcentage d'emplois détruits dans ce secteur était de 90%, faisant chuter leur nombre de 3 162 867 emplois, en 1990, à 179 791 en 1993. La force de travail était de nouveau considérée comme une marchandise. Le droit au travail avait disparu. Les travailleurs ont de nouveau été réduits à être un facteur de coûts. Le potentiel scientifique de l'ex-RDA a diminué d'au moins 60%. Le revenu des ménages locaux était retombé à 40% du revenu des ménages occidentaux et le pourcentage de femmes ayant une activité professionnelle est passé de 86% à 56%.

Mais plus intensément par rapport à ce qui s'est passé dans les autres anciens Etats socialiste de l'Est, en RDA la restauration capitaliste a été réalisée par un centre de pouvoir étranger, l'État allemand occidental, et sous une forme qui continent tous les traits d'un processus de colonisation (2).

Le rôle de la social-démocratie

Et s'il revient au gouvernement de Helmut Kohl et à la démocratie-chrétienne d'avoir trompé le peuple de RDA avec la promesse des célèbres « paysages florissants » et en entonnant le chant des sirènes sur les merveilles du capitalisme, ce fut la social-démocratie et les gouvernements du chancelier Schroder qui ont bien joué leur rôle en étendant définitivement à toute l'Allemagne la contre-révolution social par le biais du tristement célèbre « Agenda 2010 » et des mesures « Hartz IV », qui ont fini non seulement par institutionnaliser la pauvreté, mais aussi par imposer des formes modernes d'esclavage, à travers des mesures brutales, attentatoires à la dignité humaine, comme l'obligation pour les chômeurs de travailler pour un euro de l'heure.

Pour les classes dominantes, la politique du gouvernement Schroder a été marquée par des avantages fiscaux pour les banques, les grands groupes économiques et les opérations de spéculation financière, par la privatisation des télécoms, de la poste et d'autres secteurs essentiels et rentables de l'État, par le renforcement des gains réalisés pour les revenus du capital et des grandes fortunes et par la dévalorisation des revenus du travail. Le résultat de ces mesures fut la liquidation de la base financière de l' « État », une fois que ses recettes dépendent fondamentalement de la taxation des revenus des travailleurs (3).

Premièrement, on a réduit les recettes de l'Etat pour ensuite affirmer qu'il n'y avait pas d'argent pour que l'État puisse remplir ses fonctions et devoirs constitutionnels. 20 ans après, 7 millions de personnes dans toute l'Allemagne vivent en-dessous du niveau de pauvreté, tandis que le nombre de millionnaires et de multi-millionnaires a augmenté jusqu'à atteindre les 800 000 sur une population de 80 millions d'habitants.

L' « alliance pour l'emploi », conclue entre la direction social-démocrate de la Fédération des syndicats allemands (DGB) et le patronat, a conduit à la stagnation scandaleuse des salaires et à la perte généralisée de pouvoir d'achat pour les travailleurs, mais le patronat a continué à liquider des millions d'emplois et à accumuler des profits fabuleux.

Le social-démocrate, Walter Riester, vice-président du Syndicat des métallurgistes, a ouvert, en tant que Ministre du travail, le secteur des retraites au capital privé et aux activités spéculatives. Le social-démocrate Norbert Hansen, président du Syndicat des cheminots, a approuvé le plan de privatisation des chemins-de-fer (reporté en ce moment à cause de la crise financière), étant immédiatement récompensé par un poste à la direction de l'entreprise. Le social-démocrate, Klaus Zwiekel, président du Syndicat des métallurgistes a permis, en tant que membre du conseil de surveillance de Mannesmann, sa vente à Vodafone en échange de bonus exorbitants offerts à la direction de l'entreprise, ayant désormais à s'asseoir sur le banc des accusés au côté du grand patron du capitalisme allemand, Joseph Ackermann, le président de la Deutsche Bank. En un moment où il est vital pour les travailleurs d'intensifier la lutte de résistance contre le vol des salaires et la démolition des droits des travailleurs, le président de la DGB, le social-démocrate Michael Sommer, s'est refusé à exiger du gouvernement et du parlement l'abrogation de la législation qui empêche les grèves générales et impose de graves limitations aux droits des travailleurs. Le premier acte du président et des membres de la direction du Syndicat des services, après la fusion dans ce syndicat des cinq organisation du secteur des services, fut de doubler leurs propres salaires de 100 000 à 190 000 annuels, sous prétexte qu'il leur fallait des salaires plus élevés pour pouvoir négocier sur un pied d'égalité avec le patronat.

Tout cela démontre comment la contre-révolution a corrompu la social-démocratie, a provoqué l'abandon des positions de classe au sein des syndicats et a placé à leur tête des dirigeants qui s'identifiaient avec le grand capital et la bourgeoisie. Ce processus dégradant de mise en œuvre de la contre-révolution sociale et de reculs démocratiques par un parti dénommé « social-démocrate » a eu des effets désastreux sur le SPD lui-même, ayant provoqué, pour la première fois en 150 années d'existence, l'abandon du parti par son président, la plus grande scission de la base syndicale social-démocrate qu'il n'y ait jamais eu et la perte de plus de la moitié de son électorat.

Hégémonie allemande, Union Européenne et militarisme

On peut dire que le processus de dévastation et de colonisation de la RDA fut le banc d'essai pour l'accélération du projet fédéraliste, militariste et de domination du capital monopoliste de l'UE.

Maastricht, Amsterdam, Nice, l'élargissement à l'Est, l'Euro et la Banque centrale européenne, le Traité de Lisbonne, sont imprégnés des mécanismes similaires à ceux qui ont conduit à la perte de la souveraineté de la RDA, à la destruction de ses structures économiques, à la désindustrialisation, à la fin de son autonomie monétaire, à l'affaiblissement du rôle de l'État dans les domaines social et culturel, au chômage de masse et à la paupérisation massive de la population. Au nom de la « capacité de décision » d'une UE élargie à 27 membres, l'Allemagne va transformer l'UE eu un projet de satellisation de nombreux pays européens et les soumettre à ses intérêts Tout comme pour l'annexion de la RDA – imposée inconstitutionnellement et au mépris de l'article 146 de la Constitution allemande qui prévoit la consultation populaire – Berlin assurera son hégémonie, en liquidant à Nice le principe de l'égalité entre Etats et en le remplaçant par la majorité proportionnée à la population, interdisant la consultation populaire sur le Traité de Lisbonne et étouffant ainsi la volonté des peuples, qui avait déjà refusé en France, en Hollande et en Irlande la « Constitution européenne ». Joseph Fischer, qui deviendra plus tard Ministre des affaires étrangères de Schroder, formulait déjà en 1991, encore comme président du groupe parlementaire du parti « Les Verts », les ambitions de l'Allemagne dans le cadre de l'UE : « L'Allemagne retrouvera désormais (…) avec la fin de la guerre froide et la finalisation de son unification avec le consentement international, ce qu'en Europe et dans le monde, en deux grandes guerres on lui a nié, c'est-à-dire, une sorte d'hégémonie douce sur l'Europe résultant de ses dimensions, de son pouvoir économique et de sa situation géographique (…) » (4)

Aujourd'hui, même le meilleur allié de l'Allemagne au sein de l'Union européenne, la France, se plaint du fait que Berlin est en train de ruiner les autres pays européens, mettant en garde contre le fait que l' « excédent commercial allemand pourrait devenir intenable pour ses voisins de la zone euro », ce qui s'est confirmé pleinement avec l'attitude de Berlin vis-à-vis de la crise de l'euro et du déficit de la Grèce. L'euro est fait à la mesure des intérêts de l'économie allemande. La plus grande part de ses exportations, précisément les deux-tiers, d'une valeur de 627 milliards d'euros (2007) est en direction des pays de l'UE, tandis que la plupart d'entre eux n'ont pas la moindre possibilité d'exporter à grande échelle vers l'Allemagne.

Avec le changement du rapport de forces, provoqué par la contre-révolution en URSS et en Europe de l'Est, s'est opéré également une mutation extrêmement dangereuse de la doctrine militaire allemande. Pendant plus de 40 ans prévaudra en Allemagne, avec comme base les fondements constitutionnels résultants de la tragédie de la seconde guerre mondiale et de la défaite du nazisme, le principe : « plus jamais la guerre ! ». Mais à partir de l'annexion de la RDA et de la dissolution du pacte de Varsovie (1991), les forces de la contre-révolution sont arrivés à renverser cette orientation de telle façon qu'aujourd'hui il serait plus correct d'affirmer : « plus jamais de guerre... sans l'Allemagne ». Dès lors, les efforts pour transformer les Forces armées en une armée d'agression se sont succédé à un rythme hallucinant. Il faut avoir en tête que ce processus a été entamé 10 ans avant le 11 septembre 2001 et de la « guerre contre le terrorisme ».

Le général Klaus Neumann, protégé du chancelier Helmut Kohl, fut un des premiers à formuler les principes de la nouvelle doctrine militaire, soulignant que la Bundeswehr « devra être préparée à intervenir en dehors du territoire de l'Allemagne fédérale, dès lors qu'entrent en jeu les intérêts allemands » (5). Plus tard, à Bruxelles, déjà comme président du comité militaire de l'OTAN, dans une interview à la revue Der Spiegel (mai 1995), il dira que« nous ne sommes plus dans la salle des machines du navire de l'ONU, de la CSCE, de l'OTAN et de l'UE mais au poste de commande ». Le premier document officiel de la nouvelle doctrine militaire agressive sont les « Orientations pour la politique de défense », publiées par le Ministère de la Défense fédéral le 26 novembre 1992 (6). On y souligne ici que l'Allemagne est « une puissance moyenne continentale avec des intérêts dans le mond entier ». Ce qui lui confère le droit d'intervenir militairement pour « garantir les routes du commerce mondial, l'accès sans obstacles aux marchés et aux matières-premières ».

Les ministres de la Défense du chancelier Schroder (SPD) seront encore plus explicites. Rudolf Scharping, le principal instigateur de l'agression contre la Yougoslavie, inventeur du « Plan fer à cheval », expliquera au forum du SPD sur la « Sécurité » (Janvier 2001) que « d'ici à 25 ans, le gaz de la Mer du Nord sera épuisé, mais dans la région d'Afghanistan et du Caucase il y a de tout » et que « la sécurité régionale est de l'intérêt de tous ceux qui désirent extraire de l'énergie de cette région ». En 2002, le nouveau ministre de la Défense, Peter Struck, a lancé la célèbre expression selon laquelle « dans l'Hindou Kouch, on défend notre liberté ». L'invocation de la « liberté » est le carburant avec lequel le capitalisme a alimenté l'instauration de dictatures, la pratique de la torture, l'exécution de massacres, de bombardements et de guerres pour imposer sa domination mondiale. Aujourd'hui aussi en Allemagne, la contre-révolution et le revanchisme continuent à se servir du lieu commun de la « liberté » pour dissimuler l'aggravation de l'exploitation et de l'oppression des travailleurs et des peuples et pour imposer par la force des armes son hégémonie.

Notes

Die Woche. Das verkaufte Land, 5.11.1999

(2) Ekkehard Lieberam. Wesens-und Strukturveränderungen der Lohnabhängigenklasse in Ostdeutschland, 2007.

(3) Was war die DDR wert ? Berlin, 2000.

(4) Die EU, Kerneuropa und Osterweitung. Hambourg, 2003. S.109

(5) Information für die Truppe, 11/1991.

(6) Marxistische Blätter, 3 - 97. Militär – Macht - Politik. S. 34.