vendredi 26 septembre 2008

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Il y a 70 ans, le traité de Munich (1) :: Quand les alliés s'inclinaient devant Hitler

Les 29 et 30 septembre 1938 se tenait la Conférence de Munich. France et Angleterre acceptent les exigences d'Hitler et lui abandonne la Tchécoslovaquie. Un premier pas vers la seconde guerre mondiale.

Julien Versteegh

Le Premier ministre Neville Chamberlain rentrant triomphalement à Londres aux lendemains des accords de Munich, qu'il tient en main. Winston Churchill déclarera : « L'Angleterre avait le choix entre déshonneur et guerre. Elle a choisi le déshonneur, elle aura la guerre ». (Photo archives)

 

La diplomatie a des secrets que le commun des mortels ignore. Les grandes puissances reconnaissent par exemple l'indépendance du Kosovo, mais ignorent celle de l'Osétie. Elles reconnaissent l'indépendance du Timor oriental, mais n'ont que faire du sort des Palestiniens. Et parfois elles s'amusent à dépecer des états indépendants comme l'ex-Yougoslavie. Dans tous les cas, elles ignorent les aspirations des peuples. Elles dominent souvent, se mettent parfois à genoux devant la raison du plus fort.
    Comme en ce mois funeste de septembre 1938. Les deux grandes puissances du moment, France et Angleterre s'apprêtent à succomber aux aspirations de l'Allemagne nazie sur une partie de la Tchécoslovaquie. Les orientations de l'Allemagne sont pourtant des plus claires depuis l'accession d'Hitler au pouvoir en 1933. Les lois antisémites de Nuremberg ont été adoptées en septembre 1935, l'Autriche a été purement et simplement annexée en mars 1938. Au vu et au su de tout le monde et en violation complète des accords qui mirent un terme à la Première guerre mondiale, Hitler réarme l'Allemagne, ne cache pas ses intentions belliqueuses et se prépare à déclencher ce qui deviendra la Seconde guerre mondiale.
En attendant, c'est sur les Sudètes qu'Hitler lorgne. Cette région du nord de la Tchécoslovaquie, frontalière de l'Allemagne, fortement peuplée d'Allemands est au centre d'une crise qui remonte aux lendemains de la Première guerre mondiale.

Jongler avec les peuples

    En 1919, le Traité de Saint-Germain-en-Laye proclame l'indépendance de la Tchécoslovaquie  sur base du principe édicté par le président américain Woodrow Wilson du « droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ». Mais la formation de la Tchécoslovaquie ne tient aucun compte des minorités de Bohèmes, Moravie, Slovaquie, Ruthénie et Silésie et notamment celle des Allemands des Sudètes. Les Tchèques et les Slovaques ne représentent que 50% de la population, les Allemands sont 3 millions sur 15 millions d'habitants, aux côtés des populations juives, polonaises, hongroises, ruthènes ou roms.
Très vite, les représentants des Allemands des Sudètes refusent l'adhésion à la Tchécoslovaquie. L'opposition est latente durant les années 1920 et se développe durant les années 1930. La montée du nazisme en Allemagne favorise l'émergence du mouvement nazi dans les Sudètes avec la création en 1933 par Konrad Henlein d'un Front Patriotique des Allemands des Sudètes qui deviendra le Parti Allemands des Sudètes en 1935.
    L'Anschluss, l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne nazie en mars 1938, accentuent les revendications allemandes dans les Sudètes. Hitler pousse au conflit ouvert. La situation est tendue, les armées sont appelées sous les drapeaux pour la première fois depuis la Première guerre mondiale.

Pousser Hitler vers l'est

La France a un traité d'alliance avec la Tchécoslovaquie, mais n'est pas prête à la guerre pas plus que l'Angleterre d'ailleurs.
France et Angleterre poussent à la négociation avec l'Allemagne nazie qui sous les pressions du dirigeant italien Benito Mussolini accepte.
Une conférence se tient donc du 29 au 30 septembre 1938 à Munich et rassemble Édouard Daladier pour la France, Neville Chamberlain pour la Grande-Bretagne, Adolf Hitler pour l'Allemagne et Benito Mussolini pour l'Italie.
Hitler y affirme vouloir défendre les droits des minorités et vouloir libérer les Allemands des Sudètes. Il aspire surtout au contrôle de cette riche région industrielle de Tchécoslovaquie, siège des immenses et modernes usines d'armements Skoda.
    France et Angleterre se plient aux exigences allemandes et acceptent l'annexion des Sudètes par l'Allemagne en échange d'un engagement de l'Allemagne de renoncer dorénavant à toutes revendications territoriales.
Daladier et Chamberlain sont accueillis en héros à Paris et Londres pour avoir sauvé la paix. Mais beaucoup ne s'y trompe pas. Un cadeau vient d'être fait à l'Allemagne nazie. Le futur Premier ministre britannique, Winston Churchill déclarera à propose des accords de Munich : « L'Angleterre avait le choix entre déshonneur et guerre. Elle a choisi le déshonneur, elle aura la guerre ». Et de fait, quelques mois plus tard, Hitler rompt sa promesse et envahit la Tchéquie en mars 1939, la Slovaquie devenant un état indépendant dans le giron allemand. Suivra l'invasion de la Pologne qui plongera l'Europe dans la guerre. En attendant, les puissances européennes ont retourné Hitler vers l'est et l'immense Union soviétique.